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Féminisme islamique en Iran : nouvelle forme d’assujettissement ou l’émergence de sujets agissants ?/ÙŽAzadeh Kian

Critique internationales, N°46. janvier/mars 2010, p.45-66.

dimanche 18 septembre 2011, par admin

En Iran, le féminisme islamique1 a émergé notamment après la révolution, fruit d’un
processus de changement social et de prise de conscience des femmes issues des classes
moyennes ou inférieures traditionnelles et religieuses.2 Largement écartées de la sphère
publique sous l’ancien régime mais dotées d’un capital social et culturel du fait de la
massification et de l’expansion de l’enseignement supérieur dans l’Iran post-révolutionnaire,
elles se sont positionnées en subalternes politiques et ont contesté les inégalités entre les
sexes, notamment après la fin de la guerre Iran-Irak (1980-88). 3 La stratification sociale est
donc l’une des variables explicatives importantes du féminisme islamique iranien et de ses
différences avec le féminisme séculier dominé par des femmes issues des classes moyennes
modernes ou supérieures.4 Contrairement au féminisme séculier (dans ses versions libérales,
marxistes ou nationalistes) qui a marqué l’histoire du féminisme iranien du vingtième siècle
jusqu’aux années 1990 et qui se réfère notamment aux modèles occidentaux et aux chartes et
conventions internationales, le féminisme islamique se réfère au Coran et aux traditions islamiques mais mobilise le capital symbolique de l’islam afin de construire une rhétorique
revendiquant sa réinterprétation au féminin, visant àétablir l’égalité entre les sexes.
L’émergence du féminisme islamique iranien met donc en évidence l’hétérogénéité de
la catégorie ‘femme’ et la diversité des trajectoires et des vécus des femmes des classes
moyennes d’origines socioculturelles différentes. En dépit de cette diversité, les militantes
islamiques des droits des femmes partagent plusieurs traits avec des courants féministes

Parmi les magazines publiés par les féministes islamiques, Zanân occupe une place
singulière. Peu après son lancement en 1992, Zanân publie une série d’articles pour démontrer
que le Coran n’interdit pas aux femmes de délivrer des édits religieux et qu’elles peuvent
même prendre la direction religieuse, juridique et politique de la société. Rejetant les lois qui
renforcent la suprématie de l’homme au sein de la famille ces féministes islamiques ont plaidé
pour l’égalité des droits et le partage des responsabilités entre les époux. Leur argument
principal est centré autour du rôle actif que les femmes ont assumé pendant la révolution et
jouent aujourd’hui dans la sphère publique. En réinterprétant les textes et les lois islamiques,
elles entendent rétablir la légitimité de l’autorité des femmes dans les institutions politiques,
religieuses et juridiques :
"Le Coran n’a pas interdit aux femmes d’exercer la fonction de juge... Cette interdiction
prends sa source dans l’histoire de la jurisprudence, dans les opinions des ulémas d’antan,
construites probablement àpartir de l’exemple de leurs épouses ou de leur entourage féminin
qu’ils ont généralisé par la suite àtoutes les femmes".33 Les obstacles posés àl’exercice par
les femmes de l’autorité dans le domaine religieux sont débattus dans une série d’articles
publiés dans ce magazine :
« Dans les principaux textes islamiques, rien ne prouve ou ne justifie le fait que l’islam
interdise aux femmes de délivrer les édits religieux ou de devenir des sources
d’imitation. En revanche, dans les sources secondaires [les interprétations des autorités
religieuses] quelques indications existent  ».34
Selon l’auteuraucun consensus n’existe sur le sujet parmi les autorités religieuses pour
justifier de telles entraves. Par conséquent, "une femme peut délivrer des édits religieux...et
peut diriger la population dans les domaines religieux, spirituels, politiques et juridiques".35
Les féministes islamiques bénéficient du concours de femmes spécialisées en
théologie qui font une relecture du Coran et des traditions au profit des femmes. Madame
Monir Gorgi est l’une d’elles. Spécialiste reconnue de l’islam, elle a reçu une éducation
religieuse et assure la direction du Centre d’études et de recherches sur les problèmes des
femmes àTéhéran après avoir été directrice de Jame’at-ol Zahra, l’école théologique pour
femmes. Monir Gorgi réfute la position politique de la jurisprudence islamique qui interdit
l’accès des femmes aux postes de direction politique arguant d’une supposée fragilité physique et intellectuelle des femmes. Se référant au Coran, elle analyse la personnalité, les
opinions et la manière de gouverner de la reine de Saba (Belqeys) et affirme :
« Le Coran ne mentionne que très peu de dirigeants politiques et pourtant Belqeys en
fait partie. De plus, elle est dépeinte comme l’un des dirigeants les plus justes et les
plus rationnels. Ceci suffit pour attester que le Coran accepte la capacité naturelle et
intrinsèque des femmes àgérer et àgouverner. En effet, Belqeys n’est pas une
exception. Elle représente l’ensemble des femmes. Elle a montré que les femmes ne
sont pas plus faibles que les hommes en matière de gouvernement et qu’elles peuvent
même être meilleures dans la mesure où la notion de justice était l’une des
caractéristiques du règne de Belqeys ». 36
Quant aux différences biologiques entre les hommes et les femmes, Monir Gorgi constate que
dans les systèmes politiques modernes la prédominance du savoir technique et gestionnaire
moderne a rendu caduc le rôle de la force physique dans l’exercice du pouvoir. Par
conséquent, elle remet en question la pertinence de la jurisprudence politique islamique selon
laquelle l’appartenance au sexe masculin est l’une des conditions préalables pour diriger les
pays musulmans.

Féminisme islamique et citoyenneté politique des femmes sous le régime islamique

Perdant une partie importante de leurs droits civils, les femmes ont pu maintenir leurs droits
politiques parce qu’elles ont pris leur place comme actrices sociales et politiques pendant la
révolution. Ce qui a conduit l’ayatollah Khomeyni àrevenir sur les choix précédents et à
entériner, sur le plan religieux, les droits politiques des femmes. Contrairement àla majorité
des clercs de haut rang qui s’opposaient àla présence des femmes dans la sphère publique et
souhaitaient les voir regagner la sphère domestique, Khomeyni s’est prononcé en faveur de
l’activité sociale et politique des femmes islamiques : « Dieu est satisfait de leur grand service.
C’est un péché de saboter leurs activités dans la sphère publique  ».37 Avec son approbation,
quatre femmes furent élues dans chacun des trois premiers parlements islamiques de 1980,
1984 et 1988. Elles occupaient 1,5% des sièges seulement. Les privilèges excessifs accordés
aux hommes par les dispositions juridiques islamiques en vigueur n’ont pas tardé àprovoquer
le mécontentement de la population féminine, y compris celles qui, pendant la révolution revendiquaient leur mise en application. Les élues islamiques étaient assaillies par leurs
électrices issues des milieux traditionnels et religieux, mécontentes de l’aggravation de leur
condition. Ces députées qui, àl’exception d’Azam Taleqani, partageaient une vision
traditionaliste et adhéraient àl’idéologie dominante, défendaient "les besoins et les droits
islamiques des femmes". Elles affirmaient que les lois islamiques octroyaient aux femmes
tous leurs droits et que si ces lois étaient appliquées àla lettre les femmes obtiendraient leurs
droits.
L’ampleur du mécontentement de la population féminine a provoqué une mobilisation
plus importante des femmes islamiques aux élections pour le cinquième parlement (1996-
2000). Les législatives ont aussi fourni une nouvelle occasion aux femmes de revendiquer
ouvertement et publiquement leur droits et d’exiger que les candidats s’expriment sur divers
aspects de la condition féminine. Parmi les 320 femmes candidates (6% du total) certaines
comme Soheila Jelodarzadeh, d’origine ouvrière qui sera élue au cinquième, sixième (2000-
2004) et au huitième parlement (2008-2012), Faezeh Hachemi-Rafsanjani, présidente du
Conseil de la Solidarité du sport féminin des pays musulmans, et Marziyyeh Seddiqi
candidate àMashhad (deuxième ville du pays) étaient considérées par le public féminin
comme des défenseures des droits de femmes. Toutes trois furent élues souvent grâce aux
votes des femmes. Les treize élues qui représentaient 5% des sièges ont tenté d’améliorer la
condition féminine.
Fâezeh Hachemi-Rafsanjani a rejeté la lecture figée et rigide des préceptes islamiques par
les autorités religieuses et politiques et revendiqué leur réinterprétation : "Ce n’est pas l’islam
mais les interprétations par le clergé de ses préceptes qui sont àl’origine de l’interdiction
d’accès des femmes àla magistrature".38 Fâtemeh Ramezanzadeh, Soheyla Jelodarzadeh et
Marziyeh Seddiqi, quant àelles, ont affirmé que le dynamisme de l’islam devait être reflété
dans le code civil, ont revendiqué pour les femmes l’égalité du droit au divorce et le droit
exclusif àla garde de leurs enfants après le divorce.39 Le cinquième parlement a approuvé la
création d’une commission spéciale des affaires des femmes et de la famille au sein de
l’Assemblée visant la réforme des lois en vue d’une meilleure protection des droits des
femmes. Malgré l’opposition des élus conservateurs, les députées militantes des droits des
femmes ont réussi àfaire modifier certaines lois de manière àlimiter le droit unilatéral des
hommes au divorce. Pour demander le divorce, les couples doivent se présenter auprès des
tribunaux, lesquels ont été autorisés àembaucher des conseillères judiciaires. En janvier
d’obédience séculière en ce qu’elles se positionnent contre la vision conservatrice, dominante
au sein du régime islamique, fondée sur une analyse biologisante qui naturalise et essentialise
les différences entre les sexes. Cette dernière définit les femmes iraniennes exclusivement
comme mères et épouses et excluent toute possibilité d’atteindre l’égalité entre les sexes. Face
àce paradigme dominant de l’homme musulman/chi’ite, hétérosexuel qui tente de rendre les
femmes invisibles et de les cantonner dans une situation d’inférioritéle féminisme islamique
et le féminisme séculier soulignent les singularités et les particularités des femmes pour les
présenter comme sujets de l’histoire, dévoiler les discriminations dont elles font l’objet et la
domination des hommes. Ces féminismes ne se préoccupent donc pas (encore), sur le plan
théorique ou politique, des différences internes au ‘groupe de femmes’ (celles de stratification
sociale, d’ethnicité ou de religion) et des rapports de pouvoir qui le traversent dans le pays
multiethnique et multireligieux qu’est l’Iran.
Féminisme islamique et modernité
Le féminisme islamique iranien a vu le jour dans le contexte d’une société au sein de
laquelle les valeurs modernes s’enracinent. Aujourd’hui, 70% de la population iranienne est
urbaine, le taux d’alphabétisation des femmes âgées de six ans et plus avoisine 80%, le
nombre moyen d’enfants par femme est de 2 et le nombre des étudiantes dans les
établissements d’enseignements supérieurs est de 1,500,000 ou 52% des étudiants. La
scolarisation massive des filles après la révolution a contribué àretarder l’âge au premier
mariage (23) et àaugmenter le nombre des mariages fondés sur le libre choix du conjoint.5
Les conséquences sociales et culturelles de la modernisation de la société iranienne dans son
ensemble ont contribué àla revendication d’appartenances multiples par le féminisme
islamique. Un féminisme qui rejette une vision binaire faisant une distinction catégorique entre tradition et modernité, et considère les musulmans comme des êtres imprégnés de
traditions culturelles et d’attitudes politiques et intellectuelles antidémocratiques. Le
féminisme islamique tente ainsi de faire la synthèse entre les traditions culturelles dont
l’importance du rôle de la femme au sein de la famille et les valeurs modernes dont la
participation active des femmes dans la vie sociale, politique, économique ou culturelle et
l’égalité entre les sexes. Ce féminisme peut être qualifié de libéral dans la mesure où il tente
d’atteindre l’égalité entre les sexes ou de rendre justice aux femmes (selon les versions) à
travers des réformes d’institutions ou de lois fortement hiérarchiques. La stratégie des
féministes islamiques est donc celle d’une remise en cause des rapports de pouvoir au sein de
la société et de l’Etat dans le contexte de contraintes concrètes, une version de ce que Deniz
Kandiyoti a appelé « bargaining with patriarchy  ».6

Mais le féminisme islamique en tant qu’appartenance multiple est souvent contesté par
des féministes occidentales ou occidentalistes (issues des mondes musulmans) pour lesquelles
l’islam et le féminisme seraient incompatibles.7 Il est inconcevable pour elles d’admettre que
des femmes se réclamant de l’islam puisse en même temps se revendiquer d’un acte de
subversion. Ces analyses définissent les femmes musulmanes comme soumises et victimes du
patriarcat qui trouverait ses origines dans l’islam et refusent d’accorder aux femmes
musulmanes la capacité d’agir (agency). Comme le précise Leila Ahmed, « les féministes
occidentales ont réussi àrejeter leurs mythes culturels portant sur les femmes occidentales et
leur supposées infériorité et irrationalité innées, mais elles continuent àsouscrire et perpétrer
les mêmes mythes àpropos des femmes musulmanes et s’estiment supérieures àelles  ».8 Ce
féminisme se nourrit et renforce la perspective essentialiste/culturaliste qui fait une distinction
catégorique entre les mondes occidental et musulman et analyse ce dernier en terme de
déviance par rapport àl’histoire occidentale.9 Le culturalisme analyse l’islam comme une
force objective et indépendante des facteurs historiques, sociaux, économiques ou politiques
qui modèlerait les musulmans, leurs cultures et systèmes culturels, leurs relations sociales et
leurs traditions intellectuelles. « En considérant la religion comme la cause des inégalités et en percevant les femmes du Moyen-orient et d’Afrique du nord comme des êtres a
historiques, ce paradigme compromet toute analyse de changement. Il a pour conséquence de
priver les femmes d’exister  ».10
Afin de mieux comprendre les raisons de l’émergence du féminisme islamique en Iran
une interrogation sur les raisons qui ont conduit les femmes appartenant aux milieux sociaux
et culturels traditionnels et religieux àparticiper massivement àla révolution de 1979 s’avère
utile. D’autant qu’elles ont contribué au renversement d’un régime qui avait accordé aux
femmes des droits civils et politiques pour mettre en place le régime islamique qui a tenté de
restreindre les droits des femmes et leurs choix social, économique ou politique.
Femmes et droits politiques en Iran impérial
Les femmes iraniennes ont obtenu le droit de vote et d’éligibilité en 1963. En vue de
réduire le pouvoir des grands propriétaires terriens, des chefs de tribus, et du clergé, et
d’obtenir le soutien du régime par de nouveaux groupes sociaux (notamment la classe
moyenne moderne et les ouvriers industriels), le chah présenta au début des années 1960 son
programme de modernisation appelé la « révolution blanche  ». Parmi les six points de ce
programme, deux en particulier ont provoqué la colère du clergé : la réforme agraire qui
s’étendait aux terres de wafq11 gérées par l’institution cléricale et qui était susceptible de priver
le clergé de leur indépendance financière vis-à-vis de l’Etat ; et l’octroi des droits politiques
aux femmes que le clergé a qualifié d’incompatible avec l’islam : "En octroyant le droit de
vote aux femmes, le gouvernement a enfreint l’islam et a provoqué l’inquiétude des ulémas et
d’autres musulmans".12 Plusieurs clercs de haut rang s’étaient associés àKhomeyni pour
déclarer que "l’entrée des femmes dans les deux Majles (la chambre des représentants et le
sénat), ou dans les conseils municipaux et locaux, est contre les lois islamiques[ ] et abroge
les conditions que l’islam a déterminées concernant les électeurs et les élus."13
L’octroi des droits politiques aux femmes n’a pas provoqué la participation massive
des femmes (ni d’ailleurs des hommes) aux activités politiques car le champ politique restait verrouillé. Néanmoins, en 1963, pour la première fois en Iran six femmes appartenant àl’élite
ont fait leur entrée au 21ème parlement (Majles). Le nombre de députées a graduellement
augmenté pour atteindre en 1975 17 sur un total de 226 (soit 7.5%) au 24ème et dernier
parlement élu sous le chah. Quant au sénat, dont la moitié des soixante membres était
nommée par le chah, il ne comptait que trois femmes en son sein. 14
Les réformes du statut politique, social et civil des femmes sous le chah : modernisation et
exclusion
A partir de 1967, les Iraniennes ont vu leurs droits civils améliorés quand une série de
réformes (dont celle du Code de la famille) fondées sur une lecture plus moderne de l’islam
chi’ite furent introduites avec la coopération de quelques clercs de haut rang cooptés par le
régime. Ces réformes ont élargi les droits des femmes tant dans la sphère privée que publique.
Mais l’Etat impérial n’a pas retiré àla religion sa fonction légale et sociale, les lois sont
restées proches du modèle islamique : la répudiation a été abolie et le divorce est devenu
judiciaire mais la polygamie ne fut pas supprimée, elle a été seulement réglementée (le
deuxième mariage de l’homme nécessitait l’accord de sa première épouse) ; le mariage
temporaire15 a continué àexister ; les femmes ont obtenu le droit au divorce et àla garde des
enfants après celui-ci mais l’autorité parentale est resté l’attribut du père et du grand-père
paternel ; ou encore, la loi successorale est demeurée calquée sur la chari’a16 (selon laquelle la
femme hérite de la moitié de la part de l’homme).
Suite àces réformes, l’enseignement supérieur et diverses professions notamment
judiciaires sont devenus plus accessibles aux femmes sous certaines conditions cependant. A
titre d’exemple, il fallait renoncer au port du voile pour exercer certaines professions,
notamment dans l’administration (qui employait la majorité écrasante des femmes actives).
Par conséquent, afin de pouvoir se saisir des possibilités offertes, les femmes issues des
milieux traditionnels devaient parvenir àchanger non seulement leur propre culture mais aussi celle de leurs familles et entourages. Aux objections des familles religieuses s’ajoutait
l’opposition de certains clercs dont l’Ayatollah Khomeyni affirmant que la présence des
femmes dans l’administration et le secteur public semait le désordre.17
La plupart des femmes issues des familles religieuses et traditionnelles a préféré
s’extraire de la vie sociale et se limiter au rôle traditionnel de femme au foyer. D’autres, plus
jeunes et mieux instruites, qui aspiraient àune interprétation plus moderne de l’islam et
motivées par l’entrée dans la vie active étaient contraintes de limiter leur champs de
compétence aux professions dont l’exercice n’était pas incompatible avec le port de voile, ou
d’autres pratiques et croyances religieuses. L’enseignement dans les écoles et lycées religieux
des filles, fondés par les commerçants (bâzâris) et le clergé dans les années 1960, était
devenu le terrain favori des femmes islamiques instruites. Beaucoup d’entre elles furent
attirées par les enseignements de Ali Shari’ati, idéologue musulman anticlérical, décédé en
1977. Il présentait une version moderne et politisée de l’islam et des femmes musulmanes.
Son livre Fatemeh est Fatemeh est devenu très populaire parmi ces jeunes femmes tandis que
ses conférences àHosseiniyeh Ershad (un institut religieux du nord de Téhéran) attiraient des
milliers de jeunes entre 1967 et 1972.18
Les mutations de la société iranienne ont renforcé les différences entre diverses
catégories de femmes qui continuaient àse construire des identités propres. Les femmes
issues des milieux religieux ont été davantage écartées de la sphère publique par le féminisme
d’Etat et le monopole du discours féminin par la très officielle Organisation des femmes
d’Iran19 (présidée par la soeur jumelle du chah et composées de femmes appartenant àl’élite).
Créée en 1966, elle a initié certains changements dans la législation au profit des femmes sans
modifier la culture patriarcale et les coutumes sociales. De plus, étant étroitement liée au
pouvoir politique du chah qui était patriarcal, autoritaire et anti-égalitaire, elle a subordonné
les objectifs et les activités des femmes aux directives du monarque. Ce dernier ne cherchait
pas àétablir l’égalité entre les sexes et demandait aux femmes d’être modernes mais
modestes. Ceci a contribué àla participation massive des femmes, séculières et religieuses, à
la Révolution de 1979. Une révolution qui peu après institutionnalisera les inégalités entre les
sexes.

La question de la citoyenneté civile et politique des femmes dans la première décennie de
l’Iran révolutionnaire

Après l’établissement du régime islamique, un modèle basé sur une lecture
traditionaliste de l’islam fut appliqué aux droits des femmes et au droit familial : port
obligatoire du voile, limitation importante du droit au divorce et àla garde des enfants pour
les mères divorcées, retour àun âge minimum pour le mariage et la responsabilité pénale des
filles très précoce (il est porté à9 ans puis augmenté à13 ans), légalisation de la polygamie,
soumission de la femme àl’autorité et aux exigences, y compris sexuelles, de son époux,
contrôle des activités des femmes en dehors du foyer par le mari. Selon ce code pénal, le prix
du sang (diyeh) des femmes est la moitié de celui des hommes, et le témoignage d’une femme
dans une affaire pénale n’est accepté qu’àcondition d’être corroboré par celui d’un homme. Le
droit successoral, quant àlui, reste inchangé, les femmes héritant de la moitié de la part des
hommes.
Les femmes qui refusaient de se soumettre àl’ordre moral des islamistes (symbolisé
par le port obligatoire du voile en tant que premier signe d’installation du régime islamique et
son garant) ont perdu leurs emplois et ont été écartées de la sphère publique au profit de
femmes d’origines traditionnelles et souvent moins instruites, qui ont ainsi assuré leur
ascension sociale. L’imposition du port du voile a ainsi eu des conséquences bénéfiques pour
des femmes issues de milieux traditionnels, qui du fait de l’islamisation de l’espace public
furent autorisées par leurs familles ày accéder. Cette mesure a donc libéré les femmes
appartenant aux familles traditionalistes et religieuses, exclues de la participation sociale sous
l’ancien régime. Nombre d’entre elles ont réussi àentreprendre des études supérieures, à
travailler, às’affirmer et às’autonomiser vis-à-vis des hommes, de leur famille et de leur
entourage, et sont parvenues àcontester leur pouvoir. Se qualifiant d’héritières de la
Révolution, ces femmes se sont au début associées au nouveau pouvoir révolutionnaire.
Cependant, la régression des droits des femmes et l’aggravation de leur condition ont conduit
àl’émergence d’une solidarité de sexe sans précédent ouvrant des possibilités de collaboration
entre des femmes et des militantes ayant des convictions politiques et des valeurs sociales
divergentes :
« Nous savons que les laïques ne partagent pas nos convictions mais cela nous pose aucun
problème car nous oeuvrons toutes pour promouvoir le statut de la femme. Nous [militantes
islamiques] avons abandonné l’idée selon laquelle nous étions les seules héritières de la
révolution...Nous sommes conscientes que notre sectarisme a abouti àl’isolement de beaucoup de femmes compétentes pendant les premières années de la Révolution et que cet
isolement s’est fait au détriment de toutes les femmes. Aujourd’hui, nous voulons compenser
nos erreurs.  »20
En dépit des problèmes sociaux affrontés par les femmes, le gouvernement n’a conduit aucune
politique économique, sociale ou culturelle qui leur soit spécifiquement destinée. En fait, les
femmes étaient tout simplement absentes du Premier Plan quinquennal mis en oeuvre pendant
la période révolutionnaire et la guerre Irak-Iran (1980-88). Les propos d’une militante, qui se
qualifie de « féministe islamique  » et a préféré garder l’anonymat, illustrent cette prise de
conscience :
« Les droits des femmes ont subi des reculs. Les autorités n’avaient besoin de nous
que pour manifester dans la rue, mais, une fois la révolution achevée, elles voulaient
nous voir rentrer au foyer. J’ai réalisé alors que l’activité sociale révolutionnaire
perdait son sens quand les femmes perdaient leurs droits. C’est ainsi que j’ai
commencé àdéfendre les droits des femmes ».21
Durant la même période l’image de la femme musulmane diffusée par la culture et le
discours dominants était exclusivement celle d’une mère et d’une épouse et non celle d’une
femme socialement active. Dans la majorité des films, et en particulier les feuilletons
télévisés, les femmes passaient leur temps àla maison, àlaver, àfaire la cuisine, ànettoyer.
Dans les rares occasions où une femme active était mise en scène, sa vie familiale était décrite
comme étant entièrement détruite parce qu’elle travaillait àl’extérieur. Les mosquées, les
prières du vendredi et les livres scolaires étaient aussi mis àcontribution pour propager
l’idéologie dominante selon laquelle la fonction principale de la femme se limitait àla
maternité et aux travaux domestiques.
Cette représentation de la femme, qui heurtait les aspirations participatives des militantes
islamiques, combinée àla ségrégation sexuelle institutionnalisée, les ont conduites àréaliser
que ces reculades visaient toutes les femmes, quelles que soient leur conviction.

Les Féministes islamiques : esquisse d’une typologie

Les féministes islamiques peuvent être scindées en trois catégories selon leur âge, la
nature de leur instruction (théologique ou universitaire ou les deux) ou la manière par laquelle
elles se sont intéressées aux droits des femmes (par leurs activités sociales ou politiques).
Azam Taleqani est parmi les militantes islamiques des droits des femmes qui était
impliquée dans les activités politiques contestataires bien avant la révolution. Fille de
l’Ayatollah Mahmoud Taleqani- un clerc radical très populaire au sein de la gauche islamique,
décédé peu après la Révolution, cette sexagénaire a fondé en 1970 une école privée (appelée
Alayi) dans un quartier du centre de Téhéran qu’elle a dirigé avant d’être démise de ses
fonctions par les autorités pour ses activités politiques et d’être emprisonnée sous le chah. Elle
fut en 1979 la fondatrice de l’Institut Islamique des Femmes Iraniennes, et la rédactrice en
chef du magazine féminin Payam-e Hâjar et députée au sein du premier parlement islamique
(réuni en 1980) :
"L’idée de fonder une organisation féminine islamique remonte àla période dont j’étais
emprisonnée sous le chah. J’ai réalisé alors que les femmes appartenant àla gauche
laïque étaient mieux organisées et parvenaient même àattirer les femmes musulmanes.
J’étais ainsi persuadée de la nécessité d’une organisation pour servir les femmes ayant
des problèmes légaux et économiques...Après la Révolution et suite àl’application des
nouvelles lois, beaucoup de femmes venaient nous voir pour se plaindre de leur
condition. Leur griefs nous ont conduit àréaliser que les femmes avaient des
problèmes spécifiques. J’ai alors décidé de créer une association pour défendre leurs
droits et intérêts".Azam Taleqani se fonde sur les enseignements de son père pour
revendiquer la justice sociale et critique avec véhémence le consumérisme de l’élite au
pouvoir et le fossé de plus en plus grand entre une minorité qui s’est enrichie et une
majorité qui s’est appauvrit depuis la révolution. 22
Shahla Sherkat fondatrice de l’influent magazine Zanan (crée en 1992 et interdit de
publication en janvier 2008), le premier magazine en Iran àse revendiquer du féminisme, est
l’une des représentantes les plus connues du féminisme islamique en Iran.23 Quinquagénaire
née àIspahan (troisième ville du pays) dans une famille de la classe moyenne traditionnelle
(commerçante), elle a fait des études en psychologie après la révolution. Dans les années
1980, elle a été rédactrice en chef de Zan-e Rouz, un magazine féminin existant sous le chah qui, depuis la révolution, appartient àKeyhan, une société de presse dirigée par les
traditionalistes, avant de fonder Zanan grâce àune autorisation accordée en 1992 par
Mohammad Khâtami, alors ministre de la culture et de la guidance islamique. Shahla Sherkat
représente les jeunes femmes instruites mais religieuses qui après la révolution se sont
constituées en actrices sociales et ont tenté de participer au processus de la reconstruction
identitaire.24 Shahla Sherkat a contesté les inégalités entre les sexes, s’est positionnée contre
l’idéologisation de la religion et a présenté une relecture au féminin, vivante et adaptée, des
lois et traditions islamique : « Face aux problèmes qu’affrontent les femmes, un changement
radical des lois est nécessaire. Puisque plusieurs articles du code civil sont fondés sur la
charia, la réinterprétation de celle-ci est indispensable, et les femmes doivent participer àcet
effort.  »25
Zahra Rahnavard (sexuagénaire, professeur àl’université de Téhéran, ancienne
doyenne de l’université al-Zahra et épouse de Mir-Hossein Moussavi, candidat àla
présidentielle de juin 2009), Faezeh Hashemi-Rafsanjani (fille cadette de l’ancien président et
députée du cinquième parlement) et Elahah Koulayi (professeur de relations internationales à
l’Université de Téhéran et députée réformatrice au sixième parlement), Zahra Eshraqi (petite
fille de l’Ayatollah Khomeyni et épouse de Mohammad Reza Khatami, frère du président
Khatami), Fakhrosadat Mohtashamipoor (épouse de Mostafa Tâjzadeh, vice-ministre de
l’intérieur sous Khatami) ou Farideh Mâshini du Parti de la participation de l’Iran islamique
sont parmi les féministes islamiques quinquagénaires ou quadragénaires qui, àpartir de la
deuxième moitié des années 1990, ont découvert dans la politique un puissant agent de
changement pour le statut des femmes, leur pouvoir et leur place dans la société. En tant
qu’élues ou militantes au sein de partis réformateurs, elles ont défendu les droits des femmes
et leur participation plus grande aux sphères du pouvoir. En dépit de leurs liens familiaux
avec des hommes politiques, elles se sont constitué en groupes de pression et leur influence
sur la politique adoptée par leur parti n’a cessé de grandir. Ce rôle accru est susceptible de
féminiser et de diversifier la structure politique du pays.

La relecture au féminin du Coran et des lois islamiques

La période de reconstruction (1989-97), accompagnée par la fin de la guerre avec
l’Irak, a donné lieu àl’expression des revendications d’une société civile émergente, en
particulier celles des femmes. Pendant cette période, les militantes pour les droits des femmes
ont intensifié leurs activités et la presse féminine portant la voix des femmes instruites des
classes moyennes s’est développée. Les féministes islamiques ont commencé àpublier des
magazines féminins dont Zanan, Farzaneh ou Zan26 critiquant les lois discriminatoires,
revendiquant le changement du code civil et du code pénal, la législation du travail ou la loi
constitutionnelle et protestant contre le statut inférieur des femmes :
« Les femmes Iraniennes se posent la question de savoir pourquoi elles sont
dépourvues du droit de prendre la direction spirituelle, politique et juridique de la
population. Nous pensons que le Coran n’a pas interdit aux femmes d’exercer ces
fonctions. Cette interdiction prend sa source dans les opinions du clergé d’antan,
construites probablement sur le modèle de leurs propres rapports àleur épouse ou à
leur entourage féminin qu’ils ont par la suite généralisé àtoutes les femmes. Elle est
donc le résultat de l’époque où les femmes étaient prisonnières dans leur foyers et
menaient leur existence derrière les portes fermées, une époque ou elles étaient tenues
àl’écart de la société. Aujourd’hui les femmes sont présentes dans tous les domaines et
prennent part activement àla vie publique ».27
Plusieurs articles du code civil en vigueur dont celui concernant le droit des hommes à
la polygamie sont directement inspirés des versets coraniques, en particulier le verset des
Femmes (Al Nésa). C’est pourquoi certaines militantes islamiques des droits des femmes, sans
se revendiquer du féminisme, procèdent àl’historicisation et la contextualisation de l’islam
afin de réexaminer les versets coraniques. Le magazine Payam-e Hâjar publié par Azam
Taleqani fut le premier en Iran après la révolution àréfuter la légalisation de la polygamie et à
proposer une nouvelle interprétation : « L’analyse des versets coraniques sur la polygamie
montre que ce droit est recommandé par le Coran dans certains cas spécifiques et uniquement
pour subvenir àun besoin social et en vue de répandre la justice sociale  ». 28 Les cas spécifiques étant les périodes de guerre pendant lesquelles les chefs de familles étaient tués au
front laissant derrière eux de nombreux orphelins et veuves sans ressources. Ces situations
occasionnaient alors d’importants problèmes àla communauté musulmane. Dans l’absence
d’institutions sociales de prise en charge des veuves et orphelins, cette responsabilité fut
déléguée aux hommes musulmans via la polygamie. Cette interprétation affirme que « Dieu a
recommandé la polygamie dans le cas d’une nécessité sociale, et àcondition que les hommes
puissent préserver l’équité entre leurs épouses  ».29 Cette interprétation des versets coraniques
est appliquée àla réalité de la société iranienne post-révolutionnaire afin de rejeter une
justification éventuelle de la polygamie basée sur l’argument de sa nécessité sociale. Puisque
« contrairement àl’époque ancienne, l’État moderne et ses institutions sociales sont conçus
pour subvenir aux besoins des familles en difficultés, la polygamie n’a plus de fonction
sociale àremplir  ».30
Les militantes islamiques des droits des femmes critiquent aussi le code pénal fondé
sur les lois islamiques. Nahid Shid, une juriste musulmane proche d’Azam Taleqani, qui a
une double formation théologique et universitaire déclare :
« Une grande partie des lois en vigueur peut et doit être changée parce qu’elles ne sont
pas d’ordre divin. Elles sont fondées sur les principes secondaires.31 Le prix du sang en
fait partie. Il a été déterminé àune époque où les hommes étaient valorisés en tant que
combattants contribuant àl’expansion de l’islam, tandis que les femmes étaient
dépourvues d’une telle valeur sociale. Les temps ont changé et les lois doivent refléter
ce changement... La loi concernant le prix du sang ne peut pas fonctionner dans une
société où les femmes sont médecins, professeurs d’université ou ingénieurs. Leur vie
doit avoir la même valeur que celle des hommes ».32
Le droit successoral issu du droit islamique n’échappe pas àla critique des féministes
islamiques. Arguant qu’il convenait àune époque où la fonction économique était
exclusivement réservée aux hommes, elles estiment que le partage inégal de l’héritage est
rendu caduc par la participation des femmes aux activités économiques et aux revenus du
ménage. 1996, 200 femmes ont été désignées àce poste, un premier pas dans la réhabilitation des
femmes juges.
Les élections législatives de février-mai 2000 pour le sixième parlement ont été organisées à
un moment où la rupture était consommée entre les réformateurs et les conservateurs.
Fortement politisées, ces élections ont relégué au second plan les revendications spécifiques
aux femmes.40 En dépit de leur nombre limité et de la résistance d’une partie importante de la
classe politique qui entend sauvegarder l’ordre patriarcal, les élues réformatrices du sixième
parlement qui étaient connues comme militantes des droits des femmes41 ont tenté de
modifier certaines lois grâce au recours àl’ijtihad (droit àl’interprétation). À cette fin elles
ont engagé des pourparlers avec des autorités religieuses réformatrices, notamment pour
substituer des peines d’emprisonnement àla lapidation, prévue par le code pénal pour
sanctionner l’adultère (zina), pour obtenir l’égalité entre les hommes et les femmes quant au
prix du sang, ou pour augmenter l’âge minimal au mariage. Le grand ayatollah Youssef
Sane’i, selon lequel l’islam n’interdit pas aux femmes de devenir juges ni d’émettre des édits
religieux ou de diriger le pays, a, en décembre 2002, délivré une fatwa selon laquelle la valeur
de la vie d’une femme doit être égale àcelle d’un homme. Grâce au soutien des clercs
réformateurs, les élues ont souvent réussi àfaire voter des lois améliorant le statut légal des
Iraniennes. Néanmoins, le Conseil de surveillance42 a fait avorter ces réformes au prétexte de
leur incompatibilité avec l’islam. Parmi ces projets de lois désapprouvés figurent notamment
l’adhésion de l’Iran àla Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à
l’égard des femmes (CEDAW), la réforme de la loi sur le divorce afin de faciliter le divorce à
l’initiative de l’épouse, le paiement par les principaux héritiers de la pension (nafaqeh)43 à
l’épouse après le décès de l’époux (selon les lois en vigueur, l’épouse n’hérite que d’1/8ème des
biens de son époux s’ils ont des enfants et d’un quart s’ils n’ont pas d’enfants), la procréation
assistée ou encore l’égalité du prix du sang pour les femmes et les hommes. Pour la première
fois depuis la révolution, le 8 mars, la journée internationale de la femme, fut célébrée
publiquement àl’initiative de plusieurs nouvelles élues, notamment Elaheh Koulayi, députée
de Téhéran.

La loi constitutionnelle attribue àl’homme le droit exclusif àla direction religieuse et
juridique de la société (articles 5, 107 et 163), mais reste ambivalente quant àla direction
politique. L’article 115 utilise le terme rajol qui désigne un homme mais aussi une
personnalité reconnue. Cette ambiguïté a permis àcertaines de revendiquer la possibilité pour
une femme de gouverner politiquement le pays : « Quelle est la différence entre la présidence
de la république et la direction d’une administration ? Aucune. Dans les deux cas, il s’agit d’une
responsabilité exécutive. Alors pourquoi une femme ne pourrait-elle pas diriger le pays si elle
peut être àla tête d’une administration  » ?44 Se saisissant de cette même ambivalence, huit
femmes déclarèrent leur candidature àl’élection présidentielle de 1997 et défièrent la
perception des traditionalistes. Ainsi en fut-il d’Azam Taleqani : « J’ai le droit de présenter ma
candidature. De plus, je souhaite que le mot rajol soit clarifié dans la constitution. Si le
Conseil de surveillance respecte l’islam, je serai habilitée  ».45
A la présidentielle de 2001, 47 femmes, dont la plus audacieuse n’avait que dix-neuf
ans (alors que selon la loi les candidats doivent être âgés de 30 à75 ans), ont de nouveau défié
les conservateurs du Conseil de surveillance en présentant leur candidature. Leur nombre a
atteint 89 en 2005 et 42 en 2009. Néanmoins, le mot rajol n’a pas été clarifié puisque aucune
des candidates n’a été habilitée sans qu’aucune raison ne soit donnée par le Conseil de
surveillance.

De l’espoir déçu àla radicalisation

Après son élection en 1997 et en réponse aux interrogations concernant l’absence de
femmes ministres dans son gouvernement, le président Khâtami a déclaré avoir privilégié la
compétence et non le sexe. En dépit du rôle primordial joué par les femmes dans son élection
et de l’espoir que cet événement avait suscité parmi elles, aucun changement radical n’a vu le
jour concernant le statut et la condition des femmes. A cet égard, la politique du
gouvernement Khâtami ne constitue pas une rupture par rapport àcelle de son prédécesseur.
Malgré l’existence de plusieurs femmes dotées de précieuses compétences pour
l’exercice du pouvoir, y compris parmi les députées au sixième parlement, le Président a
persisté dans son refus de nommer des femmes ministres après sa réélection en 2001. Zahra
Shoja’i qui était la conseillère du président pour les affaires féminines et la directrice du
Centre de participation des femmes et Ma’soumeh Ebtekar, vice présidente et responsable de la protection de l’environnement, furent les seules femmes présentes au sein de l’éxécutif du
président Khâtami. Ce qui a provoqué la critique des élues féministes islamiques. Jamileh
Kadivar, deuxième élue de Téhéran au sixième parlement a alors déclaré :
« Nous savons que la présence d’une ou deux femmes au gouvernement ne va pas
résoudre les problèmes des femmes, mais nous sommes persuadées que la nomination
de femmes ministres aura des conséquences positives sur la société et sa culture...Dans
ce pays, on fait beaucoup de propagande pour la participation des femmes mais on
utilise très peu leurs compétences  ».46
Pour Akram Mansouri-Manesh, députée d’Ispahan, « le refus [du Président] de
nommer des femmes pourtant beaucoup plus compétentes que les hommes désignés comme
ministres est un tort àl’ensemble de la population féminine".47 Sous la présidence de Khâtami
(1997-2005), la politique de la République islamique envers les femmes est demeurée
ambiguë , comme le constate Zahra Shoja’i :
« Plus de deux décennies après la révolution, nous ne connaissons pas encore la
doctrine de la République islamique concernant les femmes. Le taux d’activité des
femmes doit-il augmenter ou non ? Nous sommes dépourvus d’un programme global
concernant les femmes. Ce ne sont pas les quatre principes de la constitution, les
sermons de l’Imam Khomeyni ou l’histoire des femmes au début de l’islam qui peuvent
nous conduire àla conception d’un programme global !".48
Cette ambiguïté doctrinale ne se résume pas aux politiques de la République islamique
concernant les femmes mais trouve son origine dans les fondements de ce régime qui se veut
àla fois républicain et islamique.
La lenteur des réformes pendant la présidence de Khâtami a déçu les femmes instruites
et modernes qui avaient joué un rôle prépondérant dans son élection. Elle a contribué àleur
démobilisation politique et leur radicalisation. L’absence de mobilisation de ces femmes a
favorisé l’ascension politique de femmes conservatrices ou ultra-conservatrices qui, grâce à
un taux de participation très bas, ont été élues au septième Parlement (2004-2008). Ce dernier,
en majorité conservateur, comptait 12 femmes, dont une seule était issue de la mouvance
réformatrice.49 A peine élues, deux d’entre elles, les plus antiféministes,50 ont soutenu la polygamie, ont plaidé pour l’accentuation des mesures répressives àl’encontre des femmes
« mal-voilées  » et se sont prononcé contre l’adoption de la Convention sur l’élimination de
toutes les formes de discrimination àl’égard des femmes (CEDAW). Ces prises de positions
ont provoqué la protestation des femmes urbaines, relayée par les revues féminines, les
journaux réformateurs et les anciennes élues réformatrices. Cette réaction a contraint les
députées conservatrices àbattre en retraite sur la polygamie. Mais, elles sont restées unanimes
àrejeter la ratification de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de
discrimination àl’égard des femmes par l’Iran comme en témoignent les propos de l’une
d’entre elles : « Nous n’avons aucunement besoin de la Convention sur l’élimination de
toutes les formes de discrimination àl’égard des femmes. Nous avons déjàpréparé une
convention islamique et si elle est ratifiée, les autres pays musulmans pourront également
l’adopter  ».51 Les femmes membres du traditionaliste Parti de la coalition islamique,
critiquaient quant àelles surtout le féminisme perçu comme « le vestige du colonialisme
occidental  », déploraient le « non respect des femmes Iraniennes pour le voile islamique  » et
revendiquaient « l’islamisation de la société  ».52 Ces positions prises trois décennies après la
révolution révèlent l’échec d’un projet islamiste de société qui n’est pas parvenu àimposer un
système totalisant prenant en charge tous les aspects de la société en s’appuyant uniquement
sur les fondements islamiques.

Le retour des féministes islamiques sur la scène politique

Depuis l’élection du président radical-populiste Ahmadinejâd (due àl’abstention
massive de l’électorat réformateur au deuxième tour de la présidentielle de juin 2005),
d’importantes régressions dans les droits et les activités des femmes et des féministes ont
conduit certaines féministes islamiques d’obédience politique réformiste àassurer leurs
présences actives dans la sphère politique/publique. L’une des occasions offertes aux
féministes islamiques de prêter leurs voix au mécontentement des femmes fut le projet de loi
portant sur la « protection de la famille  » préparé par le judiciaire et présenté courant 2007 par
le gouvernement de Ahmadinejâd. Sous prétexte de consolider les fondements de la famille,
ce projet de loi octroie de nombreux privilèges supplémentaires aux hommes en ce qui concerne le mariage polygame permanent et le mariage temporaire et limite davantage les
droits des femmes en matière de divorce. Il conditionne le deuxième mariage de l’époux à
l’autorisation du tribunal qui, elle, dépendra seulement des moyens financiers de l’homme.
Aussi sous prétexte que les douaires (mahr) très élevés seraient responsables de la baisse de
nombre de mariages chez les jeunes, les mariées se voyaient contraintes de s’acquitter d’un
impôt sur leur douaire avant même de le recevoir. Dans une résolution que certaines
féministes islamiques ont adoptée contre le projet de loi sur la famille, elles ont critiqué les
obstacles dressés [par les autorités] aux droits légitimes des femmes qu’elles qualifient
d’oppression et de discrimination, susceptibles de retarder le processus de développement du
pays. Elles se positionnent contre les conservateurs qui réduisent la femme exclusivement à
son rôle procréateur :
« Limiter le rôle des femmes aux rôles traditionnels et stéréotypés, déclarer inutile la
participation des femmes aux activités sociales et politiques, imposer des restrictions
aux activités des militantes des droits des femmes ou mettre fin aux projets de
développement des femmes ne font que perpétuer la vision du deuxième sexe  ».53
En septembre 2008, plus d’une cinquantaine de féministes islamiques54 et séculières
ont investi le parlement. Se saisissant de la rivalité politique entre Ali Larijani, le president du
parlement, et le president Ahmadinejâd, elles ont réussi àfaire retirer les deux articles de lois
particulièrement discriminatoires àl’égard des femmes.55 Les interactions entre les militantes
islamiques et séculières ont joué un rôle crucial dans leur prise d’autonomie intellectuelle,
dans la formation d’une solidarité de sexe et de classe (elles sont issues des classes moyennes)
leur permettant de défier et parfois d’infléchir des institutions, des lois et des traditions
qu’elles percevaient précédemment comme puissantes et inaltérables.
L’ampleur du conservatisme et du sexisme du gouvernement d’une part, et celle des
activités contestataires des féministes islamiques et séculières d’autre part, ont même conduit
les conservatrices anti-féministes, dont certaines députées, àrendre public leur
mécontentement sur la politique menée par leur propre camp àl’égard des femmes. Elles se sont déclaré déçues du refus du Conseil de surveillance d’habiliter les femmes candidates à
l’élection présidentielle, ont critiqué le nombre restreint des femmes dans les instances
décisionnaires, et ont désapprouvé le refus du président Ahmadinejâd de nommer des femmes
ministres. Ces élues conservatrices ont aussi vivement réagi quand leurs collègues masculins
se sont opposés àl’élection d’une femme aux instances dirigeantes du Parlement : « Dire que
la présence des femmes dans les instances dirigeantes du parlement est en contradiction avec
l’humilité des femmes musulmanes n’est qu’un prétexte. La vérité est que ces députés se
croient supérieurs aux femmes.  »56 Les législatives pour l’élection du huitième parlement qui
se sont déroulé en avril-mai 2008 ont de nouveau provoqué la colère de certaines femmes
politiques conservatrices dont Maryam Behrouzi, ancienne députée, membre du Parti de la
coalition islamique, principal parti conservateur, et présidente de la conservatrice Association
Zeynab, quand les conservateurs ont refusé de présenter plus de quatre candidates. Behrouzi
qui plaide pour un quota de 30% de candidates sur les listes électorales avait préparé, avec son
association, une liste de dix femmes sur un total de trente candidats pour Téhéran. Sa
proposition n’ayant pas été retenue par son parti, elle a refusé de participer aux élections. Le
huitième parlement compte 8 députées en son sein. Concernant les obstacles dressés àla
présence des femmes au parlement elle a déclaré : « Les femmes doivent participer
activement àla prise de décision. Il n’y a pas d’interdiction légale quant àleur accès massif
au parlement. C’est le système patriarcal dominant qui souhaite écarter les femmes de la
sphère publique  ».57
L’élection présidentielle de juin 2009 a présenté une nouvelle occasion aux militantes
des droits des femmes de défier l’ordre politique patriarcal. Une large coalition d’activistes
séculières et musulmanes a appelé le futur président de la République islamique àprendre des
mesures pour la ratification de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de
discrimination àl’égard des femmes et la modification des articles de la loi constitutionnelle et
du code civil particulièrement discriminatoire àl’égard des femmes.

Conclusion

Face àl’Etat islamique qui utilise la religion pour justifier les discriminations sexuelles
et conforter la logique patriarcale, les féministes islamiques ou les militantes islamiques des droits des femmes se nourrissent de la même religion et contestent les inégalités sociales entre
les sexes. A travers une relecture au féminin dynamique et critique du Coran et des traditions,
elles procèdent àl’historicisation et àla contextualisation de l’islam et rejettent la vision
déterministe de la religion qui sert àjustifier la discrimination sexuelle et les rapports
inégalitaires de pouvoir entre hommes et femmes. Mettant en question les identités et les rôles
sexués traditionnels attribués aux femmes, les féministes islamiques défendent l’idée selon
laquelle les différences entre les sexes relève d’un choix politique et non d’une volonté divine
et revendiquent pour les femmes le droit àla citoyenneté pleine et entière. Elles visent
également le rétablissement de l’autorité des femmes dans le domaine du sacré. Leur stratégie
consiste àconstruire des modèles religieux (chi’ites) féminins afin de s’affranchir des
hommes et des autorités religieuses qui ont jusque-làmonopolisé l’interprétation des lois et
des traditions islamiques au détriment des femmes.
Le féminisme islamique iranien conteste aussi la validité d’un modèle d’émancipation
unique qui serait issu de l’histoire et de modèles occidentaux. Il nous invite àmettre en
question les préjugés et les a priori qui entourent la représentation de l’islam comme un
corpus de doctrines figées et immuables. En prenant la parole, àtravers leurs actions et leurs
luttes, les féministes islamiques revendiquent le statut de sujets agissants, le renouveau de
l’islam et le changement des rapports de pouvoir entre hommes et femmes.
Reste àsavoir si ces efforts intellectuels et ces luttes sociales parviendront àeux seuls
àintroduire des changements structurels, institutionnels et culturels sans la volonté politique
de l’Etat.


1 Je distingue l’islamique de l’islamiste. Selon le premier, la religion a pour fonction principale la génération
des valeurs au sein de la société mais il n’entend pas appliquer les principes religieux aux institutions, aux lois ou
au champ politique. Le second, en revanche, tente d’imposer un système totalisant pour gérer tous les aspects de
la société en s’appuyant uniquement sur les fondements islamiques. Il faut aussi préciser que certaines militantes
islamiques des droits des femmes ne se qualifient pas de féministes qu’elles considèrent comme un concept
occidental. Cela ne les empêchent pas pour autant d’oeuvrer pour le changement des lois discriminatoires dans
une perspective qui dénonce les inégalités sociales entre les sexes. De ce fait, je les qualifie de féministes
islamiques.

2 Les membres de la classe moyenne moderne se distinguent d’autres groupes sociaux en particulier par la
possession de la compétence et du capital culturel. Formés dans les établissements d’enseignement supérieur, ils
sont composés de salariés des secteurs public et privé, et des professions libérales. On peut notamment citer les
enseignants, les médecins, les avocats, les ingénieurs, les officiers de l’armée, les journalistes, les écrivains et
essayistes, les étudiants d’université, etc.

3Azadeh Kian, « Women and Politics in Post-Islamist Iran : a Gender Conscious Drive to Change  », British
Journal of Middle Eastern Studies, 24 (1), 1997, p. 75-96. et Azadeh Kian-Thiébaut "Women and the Making of
Civil Society in Post-Islamist Iran", in Eric Hooglund (dir), Twenty Years of Islamic Revolution. Political and
Social Transition in Iran Since 1979, New York, Syracuse University Press, 2002.

4 Parvin Paidar, Women and the Political Process in Twentieth-century Iran, Cambridge , Cambridge University
Press, 1997.

5 Pour une analyse fondée sur mes enquêtes de terrain, voir Azadeh Kian-Thiébaut, « From Motherhood to Equal
Rights Advocates : The Weakening of Patriarchal Order  », in Homa Katouzian et Hossein Shahidi (dir), Iran in
the 21st Century. Politics, Economics and Conflict, London, Routeledge, 2008, p. 86-106.

6 Deniz Kandiyoti, « Bargaining With Patriarchy  », Gender and Society , volume 2, n°. 3, September 1988, p.
274-290.

7 Haideh Moghissi d’origine iranienne et auteur de Feminism and Islamic Fundamentalism : The Limits of
Postmodern Analysis, London. Zed Books, 1999, est parmi ces féministes.

8 Leila Ahmed, « Western Ethnocentrism and Perceptions of the Harem  », Feminist Studies, 8, n°3, Fall 1982, p.
526.

9 Bertrand Badie. Les Deux Etats : pouvoir et société en Occident et en terre d’islam, Fayard, 1987. Bernard
Lewis, "Islam and Liberal Democracy", Atlantic Monthly 27 : 12 (février 1993), pp. 89-98. ou Martin Kramer,
“Islam vs Democracy†, Commentary 95 : 1 (janvier 1993), pp. 35-42, sont parmi les représentants de cette vision
essentialiste de l’islam.

10Marnia Lazreg , “Feminism and Difference : the Perils of Writing as a Woman on Women in Algeria  »,
Feminist Issues, 14, 1. 1988, p. 87.

11 Le waqf est une donation religieuse dont les revenus financent l’institution cléricale, les mosquées, et d’autres
établissements religieux.

12Le télégramme adressé par Khomeyni au chah le 9 octobre 1962, dans Sahifeh-ye Nour, Téhéran, vol.22, 1989,
p.29.

13Le télégramme envoyé en février-mars 1963 au premier ministre Alam par neuf clercs du haut rang dont
Golpayegani, Shari’atmadari, Tabatabayi, Khomeyni, et Zanjani. Voir Sahifeh-ye Nour, Téhéran, vol.1, 1989,
p.29.

14Pour une discussion voir, Azadeh Kian-Thiébaut, "Des résistances conservatrices àla citoyenneté politique des
femmes", in Manon Tremblay (dir), Femmes et parlements. Un regard international. Montréal, Editions du
Remue-ménage. 2005. p. 225-249.

15 Le mariage temporaire (dit nekâh-e monqate’ , mot’eh ou sigheh) dont la durée varie de quelques minutes à
quatre-vingt dix-neuf ans, est propre àla chari’a chi’ite duodécimain. Pour une discussion plus détaillée voir,
Azadeh Kian-Thiébaut, Les femmes iraniennes entre islam, Etat et famille, Paris, Maisonneuve & Larose, 2002.

16 Bien que la chari’a soit la catégorie employée dans le langage courant, dans l’ensemble des pays musulmans,
les codes du statut personnel ou lois sur la famille sont en fait des dispositions basées sur une interprétation
particulière du fiqh musulman qui est décidée par les Etats au moment de leur élaboration, Sur cette confusion et
sur ses implications, notamment en termes de réformes possibles, voir l’article de Margot Badran dans ce
numéro.

17 Voir Maktoubat, sokhanraniha, payamha va fatavi-ye Emam Khomeyni, Téhéran, Ashena, 1981, p. 15.

18 Amir Nikpey, Politique et religion en Iran contemporain. Naissance d’une institution. Paris. L’Harmattan,
2001.

19 Azadeh Kian-Thiébaut, "Des résistances conservatrices àla citoyenneté politique des femmes", Ibid.

20Entretien personnel avec Mahboubeh Abbasqolizadeh, rédactrice de la revue Farzaneh, Téhéran, 27septembre
1994. Farzaneh était publié par Mahboubeh Abbasqolizadeh et Ma’soumeh Ebtekar alors maîtresse de
conférence en immunologie et qui est devenue vice-présidente et responsable de l’environnement sous Khâtami.

21,Téhéran, 12 septembre1994, entretien avec l’auteure.

22 Téhéran, 19 février 1996, entretien avec l’auteure.

23 Shahla Sherkat, Zanân, CNRS éditions, 2009.

24 Dans ce processus le poids de l’élément identitaire au fondement religieux affaiblit au profit des éléments
identitaires au fondement national ou de genre.

25 Téhéran, 27 septembre 1994, entretien avec l’auteure.

26Le quotidien Zan, publié par Faezeh Rafsanjani, a été interdit en mars 1999 par le Tribunal de la Révolution
pour avoir publié le message de l’impératrice Farah Pahlavi àl’occasion du nouvel an iranien ainsi qu’un dessin
qui ridiculisait le code pénal islamique, notamment le prix du sang.

27 Shahla Sherkat, Téhéran, 27 septembre 1994, entretien avec l’auteure.

28 Forouq Ebn Eddin, "Lozoum -e eslah -e qavanine -e marbout beh talaq, t’addod -e zojat va hezanat" (La
nécessité de la réforme des lois sur le divorce, la polygamie, et la garde des enfants), Payam -e Hâjar, 19
shahrivar 1371 (10 septembre 1992), pp.28 -29.

29 Ibid.

30 Ibid.

31 Dans la chari’a chi’ite, les principes islamiques sont scindés en principes fondamentaux qualifiés d’immuables
et d’obligatoires pour tous les musulmans le jeà»ne de Ramadan ou le pèlerinage). Les principes secondaires,
quant àeux, régulent la vie quotidienne et sont sujet au changement en fonction du contexte historique, social ou
culturel.

32 Téhéran 22 février 1996, entretien avec l’auteure. La loi permet àcelui qui a provoqué le décès d’autrui
d’échapper àla peine capitale en compensant financièrement la famille de sa victime. Le prix du sang d’une
femme est la moitié de celui d†un homme.

33 Shahla Sherkat,Téhéran, 27 septembre 1994, entretien avec l’auteure.

34 Mina Yadegar –Azadi, "Qezavat -e zan", Zanan, 1992, n°.5, p.21 et 28. L’auteur de ces articles qui a choisi
un pseudonyme féminin est en réalité le Hojjat-ol Eslam Mohsen Saidzadeh. Il sera traduit devant le Tribunal du
clergé, emprisonné et défroqué en juin 1998 pour ses visions réformistes.

35 Ibid.

36 Monir Gorgi, « Zan va zamâmdâri. Negahi beh hokoumat-e malakeh-ye saba dar qorân  », (Femmes et
direction . Un aperçu du gouvernement de la reine de Saba dans le Coran)  », Farzaneh, volume 1, automne 1993,
pp. 9-29.

37 La déclaration de Khomeyni est datée du 12 mars 1982 dans Sahifeh-ye Nour, Téhéran, 1989, vol 17, p. 211.

38 Faezeh Rafsanjani, Téhéran, 31 Juillet 1996, entretien avec l’auteure.

39 Voir, Zan-e Rouz, n° 1577, 19 octobre 1996, p.18-19 et 60.

40 Pour une discussion voir Azadeh kian-Thiébaut, Les femmes iraniennes entre islam, Etat et famille, Paris,
Maisonneuve & Larose, 2002.

41Notamment, Elaheh Koulayi, Fatemeh Haghighatjou, Fatemeh Rakeyi, Jamileh Kadivar, Akram
Mansourimanesh.

42 Il est composé de six clercs nommés par le Guide de la révolution et de six juristes proposés au parlement par
le chef du judiciare lui-même nommé par le Guide. Ce Conseil est chargé de veiller àla constitutionnalité des
lois, àleur compatibilité avec l’islam et de valider tout candidat aux élections.

43 Dans le mariage permanent, l’époux doit fournir une pension (nafaqeh ) àson épouse. La nafaqeh comprend
le logement, l’alimentation, le vêtement et les meubles (article 1204 du code civil).

44Faezeh Rafsanjani,Téhéran, 31 juillet 1996, entretien avec l’auteure.

45 Zanan, n° 34, avril-mai 1997, p.6-7.

46Voir les propos de Jamileh Kadivar in Siyasat-e Rouz, n°.115, 13 shahrivar 1380/ 4 septembre 2001.

47Voir les propos de Akram Mansouri-Manesh, députée d’Ispahan au parlement islamique, Zanân, n°79,
septembre 2001, p.12.

48Interview de Mahboubeh Abbasqolozadeh, éditrice de la revue féminine Farzaneh avec Zahra Shoja’i, Téhéran,
printemps 2001.

49 Il s’agit de Mehranguiz Morovati, députée de Khalkhal également élue au sixième Parlement. Les autres
appartenaient au camp conservateur. Raf‘at Bayat élue de Zanjan est une conservatrice indépendante. Fatemeh Alia, Nafiseh Fayyazbakhsh, Elham Aminzadeh, Laleh Eftekhari, Fatemeh Ajorlou et Fatemeh Rahbar étaient
élues de Téhéran, Effat Shari‘ati, Hajar Tahriri, Eshrat Shayeq et Nayereh Akhavan-Bitaraf étaient
respectivement élues de Karaj, Rasht, Tabriz et Isfahan..

50 Fatemeh Alia et Eshrat Shayeq.

51 Voir les propos de Effat Shari‘ati, cités in Sharq, n° 535, 28 juillet 2005, p. 3.

52 Ibid.

53 Résolution intitulée Eteraz beh layehey-e khanevadeh (Protestation contre le projet de loi sur la famille),
signée par la Commission des femmes du front de la participation de l’Iran islamique, la société de la protection
des droits des femmes, l’Association des femmes journalistes, la société des femmes musulmanes réformistes,
l’Association des chercheures en sciences humaines, in Iran Emrooz, 3 septembre 2007.

54 Parmi les féministes islamiques présentes àcette action figuraient Elaheh Koulayi, Farideh Mashini et Fakhri
Mohtashamipour du principal parti réformateur, le parti de la participation de l’Iran islamique, et Azam
Taleqani, Shahla Sherkat, Minou Mortazi-Langeroudi, et Ashraf Geramizadegan.(journalistes et militantes des
ONG).

55 Il s’agissait d’une part de la taxation de la douaire et d’autre part de l’article 23 qui autorisait les mariages
polygames pour les hommes dotés de moyens financiers suffisants sans que la condition du consentement de la
première épouse y soit mentionnée.

56 Voir les propos de Nayereh Akhavan-Bitaraf, élue conservatrice d’Isfahan. In Aftab-Yazd, n° 1599, 3
septembre 2005, p. 2.

57 Voir son interview avec Deutsche Welle le 19 février 2008, http://www.dwworld.
de/dw/article/0,2144,3137038,00.html.

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